Il y a quelques mois, Audrey Guyon, photographe me proposait de créer avec elle deux jours de sensibilisation sur la photographie autour du handicap et de la maladie. Un projet un peu ambitieux et osé… Mais bien sur, rempli de sens… alors nous voilà partis dans cette belle aventure. L’AFSR (Association Française du Syndrome de Rett) nous a tout de suite soutenu, et nous a permis d’obtenir une salle au sein de la plateforme des maladies rares. Nous la remercions pour cela, ainsi que pour son intervention lors de ces deux jours, pour mieux éclairer les besoins des familles et associations. Je tenais aussi à remercier L’association Tombée du nid qui est intervenue lors de notre conférence du dimanche. La construction de ces journées m’a évidement bousculée, mais a aussi confirmée mon engagement et mon choix de vouloir porter ses projets autrement que entre deux clients.

Ensemble pour parler du handicap ou de la maladie

Ce sont 5 photographes qui nous ont fait confiance, et qui nous ont rejoint Audrey et moi à Paris les 4 et 5 novembre 2019. Nous avons abordé différents points sur la photographie autour du handicap et de la maladie. Nous avons tenté de donner des clefs, de transmettre notre engagement, nos points de vue, nos approches… Ce qui est ressorti au travers de nos questionnements, c’est qu’il est temps d’en parler… J’ai longtemps été coincée entre mon envie d’en parler, souvent, régulièrement… et en même temps, ce souci de mettre une étiquette… Car en rajoutant le mot « handicap » ou « maladie » à chaque publication, cela me paraissait très stigmatisant, et finalement pas vraiment inclusif… Et je continue de le trouver d’ailleurs, mais ce que j’ai compris avec le recul, c’est que pour l’instant, ce n’est pas « normal » dans notre société… En échangeant avec les différents intervenants d’association et les familles présentes, il y a une peur, une inconnue, qui n’est pas simple à dépasser. Alors aidons les en communiquant… je me dis que dans quelques années, il n’y aura plus besoin de mettre cette étiquette, et que chaque famille se sentira à sa place de réserver une séance avec un photographe professionnel, mais en attendant, acceptons  de catégoriser dans notre communication, et de spécifier que oui, il s’agit d’une famille avec un membre en situation de handicap…

2 jours d’échanges, 2 jours d’émotions, 2 jours de réflexion, 2 jours où je suis certaine que nous avons tous avancé.

 

 

Lors de ces deux jours, j’ai vu de l’amour, des intentions, des engagements, et cela m’a permis de me reconnecter avec mon propre engagement. Ceux qui me connaissent savent que je suis attirée par le cercle vertueux, celui qui crée de la richesse en amenant du positif autour de soi. En accompagnant ces 5 photographes au travers de la photographie sur le handicap et la maladie, j’ai pu vérifier que c’était bien de cela dont il était question. Le don de soi n’est jamais gratuit, il ya souvent un lien associé, une faille, une blessure… J’en parlais encore hier avec une de mes clientes, qui me partageaient une théorie comme quoi « chaque soignant a besoin de se soigner »… c’est ok, je suis ok avec cela. Tant que cela n’est bien sur pas pathologique et su 😉 Bref, je m’égare sur moi même et mes questionnements quant à ma nouvelle posture mais nous y reviendrons surement un jour, mais ce n’est pas le temps de cela !

Un portrait pour des personnes dites différentes

Lors de ces deux journées d’échange, nous avons eu la visite de différentes associations. Nous avons donc pu échanger sur les attentes et les craintes des parents… Saviez vous que certains photographes refusent de photographier des personnes en situation de handicap? Et bien si, des familles l’ont vécu. Après, tout le monde s’entend, la peur de l’inconnu, de ne pas savoir réagir etc… Ok, mais il devient nécessaire alors que le photographe puisse sans souci renvoyer vers un confrère qui lui peut mettre en lumière ces familles « différentes », pour ne pas les laisser  esseulées, comme si elles n’y avaient pas le droit. Ce fut le premier constat. 

Le deuxième constat est aussi que les familles ne s’autorisent pas simplement à cette demande. Ben non, et si mon enfant fait une crise ? et puis nous ne sommes pas vraiment beaux nous, et si, et si et si….. Sauf que nombre de personnes qui passent devant l’objectif d’un orthographe se posent les même questions, et que des crises, un enfant de 2/3 ans, je vous assure il peut en faire aussi. Il suffit de préparer la séance… (ET encore que là, plusieurs avis différent…) personnellement je prépare mes séances toutes de la même manière, et finalement, je m’adapte à l’instant T, et je demande sur le moment si le handicap va empêcher telle ou telle posture, si cela est compliqué ou non… et j’avoue même tester avant en toute bienveillance, et il n’y a jamais eu de souci, que du positif !

Le besoin de communiquer… Notre société essaye d’être inclusive, mais nous sommes loin d’une inclusion réelle. Il y a du mieux comparé à il y  quelques années, mais bon, la marge de progression est encore super large. C’est ainsi, que dans l’échange, est apparu ce besoin de communiquer. Communiquer par sur ce qui est différent, mais sur qui est, sur ce qui se vit… Lors de ces deux jours de formation, une superbe petite fille est venue avec sa maman 😉 Nous avons mis en lumière leurs liens, leur regard, leurs émotions, leur singularité 😉 Il n’est pas question de handicap mais bien de beauté, de magie, d’amour. ET c’est sur cela que nous devons communiquer, comme nous le faisons avec toutes les familles qui passent devant nos objectifs !

 

Au studio j’accueille des familles, avec personne en situation de handicap ou non 😉 et je mets chacun, chacune en lumière, pour révéler chaque personnalité, espièglerie, profondeur etc… Alors n’hésitez plus et autorisez vous un super portrait de famille !

 

Des portraits dans les institutions

L’engagement n’est pas que pour les familles, mais aussi pour les institutions. Peu accordent un budget pour avoir de photos digne de ce nom pour communiquer… Et pourtant, c’est la base. Des photos qui parlent de ce qu’il se vit dans ces instituions, car les parents n’y sont pas. Cela ne viendrait pas à l’idée d’un internat de ne pas valoriser leur programme… et pourtant… Dans les institutions spécialisées il y a des ateliers, des temps forts, des temps calmes,  etc.. Mettre tout cela en lumière c’est aussi mettre en lumière le travail des personnels soignants et accompagnants, c’est valoriser le lien qui se crée avec nos chers têtes blondes.

De plus, dans chaque école on a la possibilité d’avoir un portrait de notre enfant, et ce jusqu’au lycée… alors pourquoi pas pour la plupart des enfants en situation de handicap ? Parce que c’est payant? mais c’est logique que ce soit payant, car il y a un travail derrière, mais pourquoi enlever ce choix aux parents ? Et pour l’enfant lui même c’est primordial, en situation de handicap ou non. Avoir un beau portrait de soi, c’est envoyer une dose de confiance en soi, c’est accompagner ces âges de transition, c’est permettre de se révéler à soi, à l’autre.

Il est temps que les instituions et les représentants de l’état perçoivent l’importance du support photographique dans l’approche thérapeutique. Le support photographique fait du bien aux soignants, aux patients, aux enfants, aux familles, aux personnes qui ne sont pas touchées, à celles qui le sont… le média photographique est simplement une base grâce à laquelle on peut créer 1000 possibilités, 1000 communications, 1000 approches thérapeutiques, et valoriser ceux que l’on ne valorise que si peu…

 

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